Légendes et contes japonais
Le Japon, avec ses quartiers de Tokyo bondés et ses innovations technologiques, fait figure d’exemple de modernité, à la limite du futurisme. C’est oublier l’importance des traditions et des légendes qui continuent encore à alimenter sa culture et sa littérature. Car le Japon est avant tout un archipel sur lequel la Nature règne toujours, et à laquelle la population, très isolée jusqu’à l’ère moderne, a su donner un visage.
Ou plus exactement, 8 millions de visages, soit le nombre approximatif de kami ou dieux présents partout sur l’île, du fameux mont Fuji jusqu’à la Lune. Le premier roman japonais conte ainsi l’histoire de la princesse Kaguya, être céleste qui inflige plusieurs épreuves à ses prétendants, avant de retourner sur l’astre inaccessible d’où elle vient. Ce texte est toujours étudié dans les écoles japonaises.
La tradition animiste, qui a longtemps été la religion majoritaire au Japon, attribue ainsi un esprit et un pouvoir à chaque chose sortant de l’ordinaire, marquant un lieu important spirituellement ou particulièrement utile dans la vie quotidienne. Si le culte des nombreux dieux se perd peu à peu, la tradition veut que l’on accorde toujours une petite prière au dieu local ou à celui de la chance avant la réalisation d’un projet, comme la construction d’un pont. Mieux vaut prévenir que guérir… Un manquement à ces devoirs spirituels, même dans la société moderne, est considéré comme imprudent, sachant à quel point les dieux japonais peuvent se révéler monstrueux. Cette crainte est entretenue par des légendes qui font encore l’objet d’une part non négligeable de la littérature japonaise, dont les mangas. Les auteurs et mangakas évoquent souvent des créatures étranges appelées yokaï (démons) ou bakemono (monstres). A la fois terrifiantes et comiques, ils sont à la fois des dieux mineurs et des êtres malveillants, comme les kappa ou les tanuki.
Imaginez une grande tortue adorant les concombres. Ajoutez-lui un bec de canard, deux bras et deux jambes sur lesquelles se tenir et un crâne creux avec une couronne de cheveux, dans lequel il n’y a que de l’eau. Vous aurez une idée d’à quoi ressemble un kappa. Si la créature peut sembler sympathique, elle est en fait douée d’une force gigantesque, et n’hésite pas à noyer le voyageur imprudent qui marcherait trop près de sa rizière ou du bras de rivière dans lequel il vit. Le seul moyen de s’en débarrasser ? Le saluer bien bas. Le kappa, qui, s’il noie les passants, reste extrêmement poli, vous rend votre salut. L’eau coule alors de sa tête, le laissant sans force. Ne reste plus qu’à courir très vite, et apporter des concombres le lendemain pour apaiser sa colère. Le tanuki, lui, ressemble au raton-laveur, avec d’adorables oreilles rondes. Pourvu de talents de transformation, il est connu comme un grand farceur, quitte à ce que la plaisanterie aille jusqu’à la mort de sa victime. Les hallucinations sont souvent considérées comme l’une de leurs “blagues”.
Il existe pléthore de yokaï bien moins comiques, comme le tengu, être belliqueux à mi-chemin entre l’homme et l’oiseau (monstre évoqué dans le film Les 47 rônins), ou l’oni, ogre à la force colossale armé d’un gourdin, embusqué dans les montagnes. De quoi alimenter les 512 pages du Dictionnaire des Yokaï, écrit et illustré par Shigeru Mizuki. Ces monstres incarnent les peurs humaines face aux accidents en montagne, aux noyades inexpliquées ou aux colères du climat, si dévastatrices dans l’archipel, et aussi imprévisibles que la colère d’un kappa.
D’autres matérialisent la peur simple, naturelle mais pas moins glaçante de la mort. Le culte des ancêtres est très respecté au Japon : chaque famille dispose d’un autel consacré aux êtres chers disparus, sur lequel poser des offrandes (encens, nourriture), entretenir leur souvenir et apaiser leurs esprits. En cas de mort brutale ou de non-respect des coutumes funéraires, on risque fort de voir revenir un fantôme très contrarié, capable de s’en prendre aux vivants. De nombreux récits mentionnent des femmes mortes abandonnées par un amoureux ou par un mari qui reviennent leur apprendre le savoir-vivre. Les cas de possession ne sont pas rares non plus, nécessitant l’intervention de prêtres animistes ou bouddhistes providentiels et constituant un excellent matériau pour les écrivains et conteurs, comme Lafcadio Hearn et ses Fantômes du Japon.
Vous l'aurez compris, les légendes et contes japonais ont une place fondamentale dans la culture nippone, mais pas que. De nombreux auteurs, réalisateurs et musiciens continuent de s'inspirer de cette source aussi riche qu'intarissable.
Et vous ? Connaissiez-vous ce pan de la culture japonaise au delà des exemples que nous avons cités ?
Article rédigé par Eva Dodero le 02/02/2022
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